• Romain Laurendeau

Derby


« On a grandi avec le foot, le stade. Ça dépasse tout, même la religion. Au stade, on est libre »

En Algérie, le foot est partout. C’est le sujet favoris d’une jeunesse qui s’ennuie et qui ne se reconnaît ni dans l’état, ni dans ses institutions. Entre petits boulots, débrouille, les mœurs qui se radicalisent, elle est en proie à toutes les frustrations dans un pays où le droit de manifester dans la rue est quasi interdite.

Pourtant, un espace échappe à cette fatalité. Le stade devient une fois par semaine fureur et défoulement. Mais cela dépasse de très loin les pratiques partisanes que l’on retrouve chez tous les supporters. Ensemble, ils existent. Ils chantent le chômage, la pauvreté, l’Europe où ils rêvent d’aller. Ils défient l’état ou les généraux qu’ils tiennent responsables de la ruine du pays. Ils affirment leur appartenance à leur quartier, véritable identité empreinte des valeurs qui jadis libérèrent l’Algérie mais qui ont, à leurs yeux, été trahis par le pouvoir. Au stade, ils goûtent à la liberté.

Si pendant des années, le pouvoir a instrumentalisé le football pour éloigner la population de la politique, aujourd’hui, l’outil lui échappe. Comme au temps de la colonisation, le stade est de nouveau un espace de consolidation nationale et de résistance. Le cirque romain désiré est mort, pour laisser place à l’agora grecque. Le temps d’un match...

Romain Laurendeau

Après une formation de photographe, il contracte un Kératocone, une maladie qui déforme progressivement ses cornées. Pendant ces années de maladie, Romain explore l’intime, au travers de séries introspectives se nourrissant de ses doutes.
En 2009, une transplantation de cornée lui sauve la vue. C’est une liberation. Il est alors submergé par une soif de liberté et de l’envie de comprendre le monde. Depuis, Il n’a de cesse de voyager afin de documenter la condition humaine sous tous ces aspects sociaux, économiques et politiques.
Pendant 3 ans, il réalise au Senegal des sujets remarqués notamment sur les chercheurs d’or qui lui vaut plusieurs prix et une exposition à Paris et au Japon. La même année, son sujet sur les élections au Sénégal, sera sélectionné au Prix Bayeux-Calvados des Correspondants de guerre.
Depuis 2014, il mène un travail de fond et au long cours, sur un pays assez peu couvert par la presse française, l’Algérie. S’intéressant principalement à une jeunesse algerienne qui s’ennuie, pris entre le poids d’une histoire qu’elle n’a pas choisi et un avenir qu’elle pense inexistant.
Il obtient le prix AFD, le prix Camille Lepage, le prix Roger pic et le prix Pierre et Alexandra Boulat pour son travail en Algérie. Il sera également projeté au festival Visa pour l’image en 2015 et 2016, et plusieurs fois exposé..