J’ai des choses à dire à mes enfants
Des secousses du vivant des morts des survivants du sauvage des sauvageons de la nature de l’esprit des lieux de la poésie du rêve de la clairvoyance du mensonge du vrai de la dépendance de la liberté de l’impermanence des choses de la patience, beaucoup.
D’abord il y a cette cabane de moyenne montagne, sur les rives de la Mer de Glace, un lieu chaleureux dans un environnement hostile. Chaleureux, de par le cocon qu’il offre et l’accueil qu’on y reçoit, mais hostile dans cet environnement sauvage où le climat, parfois rude, façonne le paysage autant que la personnalité des gens qui y vivent ou qui le traversent.
Et puis il y a les services d’addictologie, de soins de suite et de réadaptation de l’hôpital de Chamonix et l’Ehpad, des patients et des résidents préparant une prochaine “ascension de vie”.
Ainsi peut-on se poser la question : qu’est-ce qui se passe au refuge ? Refuge de montagne ou refuge mental, besoin physique ou besoin intime de trouver un abri, un cocon voire une planque ? Ce qui est certain, c’est qu’il n’est qu’une étape, un espace temps pour se déposer, soi, avant de poursuivre sa route et placer ses cairns, ses repères. L’artiste pose ses pas dans une démarche poétique des lieux, elle entre délicatement dans le monde végétal, minéral, montagnard vécu comme sauvage, cruel même, où l’homme pose ses pas, choisit sa voie. Elle explore la forêt, les roches, dort en montagne, fait des portages, elle expérimente les montées, les descentes, dans la neige, la glace, au printemps, les nuits, les jours.
C’est physiquement qu’elle aborde le projet, en le vivant de façon totale, en entrant dans l’Esprit des lieux.
Parallèlement, elle écoute et accompagne les patients dans un processus thérapeutique afin d’ouvrir la porte du refuge, le quitter avec douceur, ou, de l’habiter de façon totale.Le mode opératoire de la création présentée est tout à fait singulier, en allers-retours, l’artiste a apporté son travail et ses pistes à l’hôpital, les patients ont nourri ses recherches.
L’artiste s’en va questionner les mémoires, et ce qu’elle va toucher du bout des doigts, ce n’est pas seulement une mémoire psychique, savante ou intellectuelle, c’est une mémoire qui appartient au mystère, au monde sensitif.
Dans ce projet, art, science optique et science cognitive sont associés au service de l’Autre.
La forêt nous parle.
Elle a des choses à dire à ses enfants.